interview bd



Aujourd'hui, à l'heure où vous sortez d'un débat sur "La Bande Dessinée est-elle une littérature ?" (question sur laquelle j'aimerais bien avoir votre avis), nous constatons que la B.D. à tendance à s'exporter sur un nouveau média qui est l'Internet, où certains auteurs commencent même à créer des oeuvres complètes. En tant qu'auteur de site et d'albums plus conventionnels, quel est le regard que vous portez sur le mariage entre Internet et bande dessinée ?
Benoît Peeters : Pour la première partie de votre question, je dois dire que si la bande dessinée est véritablement un art, elle est un un art à part entière. On nous dit parfois qu'elle est une para-littérature, certains esprits méchants prétendent que c'est une sous-littérature, d'autres une littérature populaire. Je crois qu'avant tout la bande dessinée est une forme d'expression à part entière qui à a voir à la fois avec la littérature et avec le dessin, mais qui est originale. La bande dessinée n'est pas un simple mélange de genres, c'est vraiment une forme à part entière, ce que j'ai essayé de montrer dans quelques textes que j'ai écrit sur le sujet comme "Case, planche, récit - lire la bande dessinée" chez Casterman.
De la même façon je pense que la bande dessinée et l'Internet sont deux formes différentes. L'Internet, au moins potentiellement, est un média lui aussi à part entière qui à sa propre richesse.
Il existe des recoupements avec la bande dessinée, notamment parce que l'Internet se prête à être un mélange de supports, un mélange d'images parfois mobiles, de textes, de sons, et bientôt de plus en plus d'images cinématographiques. En même temps, si l'Internet est intéressant, c'est par les choses spécifiques qu'il permet et la bande dessinée par les choses spécifiques qu'elle permet elle aussi. Il peut y avoir une rencontre mais ce n'est pas un équivalent. Je pense que mettre une BD telle quelle sur Internet n'est vraiment pas intéressant. Ce qui marche bien, par contre, c'est le travail réalisé par les gens qui ont inventé des scripts pour l'Internet, conçus pour le format d'écran afin d'offrir un confort de lisibilité. Mais aussi avec une périodicité qui rejoint les feuilletons des journaux. Mettre en ligne un album entier n'est pas très intéressant. Sur le site que nous avons crée avec François Schuiten, nous avions présenté en feuilleton notre plus récent album "L'ombre d'un homme". Ce n'est pas ce qu'il y avait de plus passionnant sur le site où par contre, d'autres aspects plus spécifiques fonctionnaient et fonctionnent beaucoup mieux.

peeters - © Laurent Ryder

Benoît Peeters avec,
en fond...

Le Net nous à toujours intéressés depuis que nous l'avons découvert car nous avions l'impression qu'avec l'histoire de "La fièvre d'Urbicande" où il était question d'un réseau qui grandissait jusqu'à envahir et métamorphoser une ville et ses habitants, nous avions réalisé une sorte de métaphore de la Toile. On s'est dit : "Tiens ce serait amusant de faire fonctionner l'univers des Cités obscures sur Internet ! ". Nous avons commencé de manière assez petite et puis, un complice est devenu le réalisateur de notre site et lui a donné plus d'ampleur. Puis peu à peu, on à eu le plaisir de voir d'autres gens créer leur propre site autour d'Urbicande. Nous les avons encouragés à le faire. Ces gens se sont un peu fédérés et maintenant il existe de nombreux sites parallèles très vivants et qui se mélangent allégrement avec le nôtre et qui prouvent que l'effervescence concernant les Cités obscures sur le Net est assez grande (voir entre autre : www.ebbs.net).

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